Entrez dans la jungle... (GC)

Take care of your ass, Invité is in the place ! Invité

Un jour, j'ai vu un film en compagnie de Crown. D'accord, vous allez dire que ce n'était pas spécialement pertinent de ma part de vous relater ce fait, mais attendez la suite. Donc, j'ai vu un film avec Crown, et ce film s'intitulait Mean Girls. Vous savez, l'histoire de la fille qui fait semblant d'être une "méchante" pour détruire les vraies "méchantes"? Avec Lindsay Lohan, avant qu'elle ne devienne une jeune femme rebelle... Bref, j'ai vu ce film et, malgré l'absence d'originalité (scénario mille fois vu, et encore revu) et les personnages pas tous très crédibles (d'ailleurs, l'actrice qui jouait la pétasse en chef, elle me fait beaucoup penser à Mme Brockelhurst, pas vous? seulement physiquement, on s'entend.), une scène en particulier a retenu mon attention. Vous savez, celle dans laquelle tous les adolescents, dans la cafétéria, agissent comme des animaux de la jungle? On pourrait croire, parfaitement à tort, que c'est extrêmement exagéré, mais dans les faits, la réalité ressemble bien souvent, malheureusement, à cela.

Je n'ai évidemment pas fait toute cette analogie entre la réalité et Mean Girls pour rien. Mon point, c'est qu'en entrant dans la cafétéria, ce midi-là, je n'ai pas pu m'empêcher de retenir une petite exclamation de surprise. Devant moi, des dizaines et des dizaines de jeunes se poursuivaient, se lançaient de la nourriture, abusaient de leurs pouvoirs de super-héros et couraient partout en hurlant. C'est ça, être un humain? Des années d'évolution pour en arriver à ça, un point encore plus bas qu'au départ? Ri-di-cu-le. Selon moi, chaque personne devrait individuellement se forcer afin de toujours demeurer classe et irréprochable. Dans quel monde de fou étais-je donc tombée?

Au moment même où cette dernière phrase était dans mon esprit, la fatalité eut envie de me jouer un tour et de prendre mes pensées mot pour mot, faisant en sorte que je dérape dans une poignée de spaghettis gisant par terre. Et voilà que, littéralement, je tombais dans leur monde de cinglés. Légèrement déboussolée, assise par terre dans un amas de pâtes, je regardais autour de moi d'un air ahuri. Des élèves se bagarraient toujours autour de moi, et quelqu'un, soudainement, lança un appel général. "Bataille de bouuuuuuffeeeee!" Le cri résonna longuement dans la cafétéria, puis la nourriture se mit à voltiger dans les airs alors que les étudiants redoublaient d'ardeur à se bousculer. Moi qui croyais que rien ne pourrait être pire que de tomber dans du spaghetti... Décidément, ce midi n'allait pas être de tout repos.

La fureur montait en moi alors que je me redressai en cherchant des yeux un endroit où me cacher. Être encore plus sale que je ne l'étais déjà? Non merci. Je repérai soudainement une table à proximité, sous laquelle je pourrais me planquer et attendre que la pluie de nourriture cesse. Protégeant mes cheveux à l'aide d'un livre que j'avais entre les mains, je courus en direction de la table... et fonçai brutalement dans quelqu'un que je reconnus comme étant Gaya-Circée, une autre artefact. Ne prenant pas trop le temps de réfléchir - ou de m'excuser - je l'attrapai par le bras et l'entrainai vivement avec moi sous la table. Ce n'est qu'une fois que nous fûmes bien à l'abri que je lui souris de toutes mes dents, sortant mon moi-blondasse-stupide. Après tout, c'était sous cette forme que me connaissait la jeune fille, donc...

"Oooooh, GC, mais il y a des macaronis dans tes cheveux! Une chance que je t'ai sortie de la bataille, hahaha!"

Ajouter un gloussement ridicule à la fin de la majorité de mes phrases était devenu tout à fait naturel, pour moi. Dès que je n'étais plus avec Crown ou Silver, je me transformais automatiquement en une créature stupide et superficielle. Le jeu, à la longue, devenait légèrement lassant, mais comme c'était la meilleure méthode pour faire des gens ce que je désirais, je n'allais pas changer ma façon de faire de sitôt.

Gaya-Circée était aussi blonde que moi, physiquement parlant. Mentalement, bon, elle n'avait pas l'air spécialement imbécile. J'avais par contre compris que lui faire confiance n'était pas une bonne idée. Après tout, qui pouvait être mou comme elle sans cacher quelque chose? Et ce quelque chose, j'allais le découvrir, parole de Veronica Harlow. D'ailleurs, la perspective d'être coincée avec elle sous une table, alors que des enragés se battaient à coups de morceaux de pain autour de nous, ne pouvait que m'enchanter. Percer le mystère GC était l'un de mes grands objectifs.

C'est le bordel. Pire qu'a la maison, quand on mange de la purée et que maman va chercher du beurre dans la cuisine et que Lylee-Rain commence à s'agiter et que du coup Paisley-Davis sait que ça va dégénérer et qu'il préfère se venger avant qu'on lui fasse quoi que ce soit et qu'il lui balance son assiette en plein dans la... face, et que papa se recule rapidement, pendant que Lylee-Rain se met a riposter et que Aymee-Devin se met a brailler pour appeler ma mère et que Juan-Drew essaie de la bâillonner et que tellement il rigole ça changer rien, et que papa soupire pour cacher son rire et que Lylee-Rain s'en prend a moi et que maman revient en gueulant et qu'on l'écoute pas tellement il y a de bruit et tellement on s'amuse.
En fait, c'est exactement ça, sauf que c'est multiplié par le nombre de personnes en plus, et que c'est des spaghetti. Je sais pas ce que je préfère. Les spaghetti, ou la purée. Les spaghetti, ça fait plus mature, parce que la purée, c'est que les bébé ou les vieux, qui en mangent. Je pense qu'on devrait faire des débats comme ça, en cours. mais les profs veulent pas. Enfin, je leur ai jamais posé la question, parce que j'ai pas eu le temps.
Queeryn s'égosille et balance des spaghetti partout, Némésis pique sa crise parce que ça va tâcher ses vêtements, et je sais pas trop si il faut que je lui dise maintenant que c'est déjà fait, ou si j'aurais du le faire il y a cinq minutes, ou si je vais devoir le faire plus tard. Maybelle me regarde, effrayée, et me dit un truc, qui doit être super important, mais avec les deux autres qui hurlent comme des tarées a côté contre des gens qui en ont rien à faire, j'entends que dalle. Elle s'en rend compte, je crois, parce que elle se lève, se protège avec son plateau et de le dépose. Queeryn la suit distraitement en continuant de brailler , et Némésis s'active vers la sortie. Je soupire et lève les yeux au ciel. C'est rien, bon sang ! Juste un peu de nouilles ! C'est mieux que la purée !
Et bien tant pis, moi je reste là. En plus, j'ai la dalle, alors je vois pas pourquoi je m'en irais d'ici. Je continue a manger, tranquillement, en regardant quand même la scène, parce qu'une assiette, ce n'est pas inoffensif contre des dents fragiles, un nez délicat. enfin, je sais pas si c'est inoffensif contre les nez pas délicats et les dents pas fragiles, remarque. Je demanderais à Lylee-Rain, à l'occasion, elle a déjà du tester sur Paisley-Davis. a moins que ce ne soit l'inverse.
De temps en temps, je sens des trucs me tomber dans les cheveux ; je me dis que c'est dégoûtant, mais au moins je ne me ferais pas coller parce que j'ai participé, donc je pourrais prendre une douche avant les autres, ce soir, ce qui est vraiment pas mal du tout.
J'allais apporter une fourchetée a ma bouche quand une masse me plaqua par terre et ma tira sous la table. Je poussais un petit bruit étrange. Je veux dire, pour moi, c'est un cri de terreur, mais quand un jour Némésis m'a demandé pourquoi je faisais ce bruit et que je lui ai dit, elle m'a rit au nez en me disant que c'était plutôt un petit bruit étrange ; après, elle a dit qu'étant donné que ça venait de moi, ça ne l'étonnait pas plus que ça. je n'ai pas tout compris, mais j'ai l'habitude, avec Némésis, alors je ne lui en veux pas plus que ça.
Enfin bref, je m'égare, et je fais partie de ces gens qui pensent, et qui parlent après. En tournant la tête, je me rend compte que c'est Ronnie, une fille un peu bizarre mais sympa, elle est comme moi, parfois, ça me rassure, parce que ça m'arrive de sentir seule et incomprise.

RONNIE ;

Je rigole un peu aussi, et puis je me rend compte que c'est pas vraiment drôle.

GAYA-CIRCÉE ;

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"Bah, tu sais, j'ai déjà survécu à pire ! Enfin, merci. Toi tu as des nouilles sur ton c... pantalon !"

Hum, elle avait bien faillit se trahir, la Gaya-Circée. Une jeune fille plutôt vulgaire se cachait sans doute sous sa carapace. Et quand on était aussi déterminée que moi, tous les moindres détails avaient une importance capitale. Ouais, capitale. Limite monumentale. Et j'en passe, vous savez. Tout pensant à cela d'une façon anormalement rapide - moi en mode machiavélique, quoi - je souris à Gaya-Circée. Sous la table, nous étions plus ou moins à l'abris des projectiles. Une petite boîte de lait revola justement près de nous, son contenu explosant sur mes chaussures neuves. J'affichai rapidement une mine horrifiée mêlée d'incompréhension en regardant le lait couler avec lenteur sur le tissu satiné de mes mignons petits escarpins roses. J'imagine que c'était l'attitude à avoir, en pareille situation. Même si je m'en foutais complètement, de mes escarpins.

"Ils sont ruinééééééés!"

Une suite de paroles incompréhensibles quitta mes lèvres. Quelque chose du genre "rahmaisjevaisfairequoijevaisfairequoijelesaimaiiiiiiis!", juste histoire d'en ajouter une couche à mon pseudo-désespoir. Parce que non, bien sûr, je ne pouvais pas me douter que du lait, ça se lave très facilement. Je levai un regard piteux vers GC, me demandant comment elle allait bien pouvoir réagir. S'inquiéter avec moi? M'observer avec incrédulité? Peu importe. Je n'avais pas de temps à perdre, puisque déjà, des surveillants avaient fait irruption au milieu de la bataille, tentant de stopper les étudiants déchaînés. Quelques minutes, tout au plus, et l'aventure bataille de bouffe serait vraisemblablement terminée.

"T'as vu, des professeurs sont entrés... À leur place, j'aurais peur d'être attrapée et ligotée par les élèves. Faut dire qu'ils sont vraiment fous, avec des poignées de spaghetti dans les mains..."

Le drame "chaussures ruinées par le lait" était maintenant terminé. Je fis mine de me plonger dans une intense réflexion à propos de la soudaine baisse de QI des étudiants lorsque le cri "Bataaaaaiiiiilleeee!" avait été lancé. En réalité, je cherchais quelque chose de pertinent à raconter, histoire de soutirer quelques informations de plus à GC. Il faut dire que mon inspiration était tout simplement au plus bas. Où était donc passée cette Ronnie pour qui les limites n'existaient pas? Aucune idée. Tout ce que je savais, c'était que si je ne parvenais pas à avoir une idée brillante le plus rapidement possible, Gaya-Circée allait quitter notre cachette et que tout ce temps aurait été perdu. Très mauvaise chose, donc.

Une soudaine apparition vint me déranger dans mes pensées. Près de nous, une jeune fille à la crinière brune pleine de spaghetti et de brocolis venait de s'écraser sur le sol, rampant vers le dessous de la table. J'ouvris de grands yeux horrifiés en reconnaissant Crown, qui jamais n'avait eu l'air aussi débraillé. Je lui lançai un regard signifiant quelque chose comme "Mais qu'est-ce que tu fais ici, tu vois pas que je suis en pleine machination diabolique? Tu vas tout gâcher, pour sûr!" et elle me répondit d'un sourire que je ne connaissais que trop bien, son sourire "Arrête de t'inquiéter, je m'occupe de tout." Sûrement, Crownichouette, tu t'occupes de tout. Elle ne voulait vraiment pas me laisser mon indépendance, je crois.

"Ronniiiiiiiie! Mais t'étais passée où?", me demanda-t-elle d'un air terriblement faux -pourtant, elle avait l'habitude d'être bonne actrice... Elle se tourna lentement vers GC et la détailla d'un air vaguement las.
"Ah. Salut, GC. Bon, dit-elle en se retournant vers moi, je crois qu'il serait brillant de s'enfuir au plus vite. Les surveillants vont attraper tous ceux qui se trouvaient dans la cafétéria pendant la bataille, alors... Sauvez-vous, quoi."

Sur ces paroles brillantes, elle se releva et piqua au travers des tables et des adolescents débiles. Je me retournai vers Gaya-Circée et lui souris d'un air stupide.
"Pas besoin de partir, jamais ils ne nous trouveront ici!"
Sur ce, j'éclatai d'un rire cristallin qui aurait été très mignon si j'avais été une gamine de sept ans. Tout ce que je pouvais espérer, c'était de ne pas devenir comme Cady et de littéralement me transformer en cette double-personnalité que je jouais, telle une actrice. Ouais, toujours des références à Mean Girls. Il faut dire que le contexte s'y prêtait un peu trop.